La marmite mauricienne n’a eu de cesse d’évoluer. « Nous avons de la chance d’avoir bénéficié des plusgrandes influences culinaires, à partir desquelles nous avons pu faire notre cuisine », souligne le ChefMooroogen Coopen.
« Nous avons un mélange de saveurs et un goût typique. »
Notre sauce blanche par exemple, qui puise ses origines dans la cuisine française, n’a plus grand chose à voiravec la recette de base. Le thym, star de nos petits plats, y déploie tous ses arômes, avec du persil, de l’ail et du fromage. Une sauce blanche chouchou… Quel délice ! Autre registre, plus fort en goût, le civet, qui est devenu notre salmi grâce au mariage de diverses épices, dont la cannelle et le clou de girofle, explique le Chef Coopen.
Inconditionnel de la cuisine du pays, Jacques de Maroussem a été témoin des changements ces dernières décennies. Selon lui, si la cuisine typique a été délaissée, « c’est parce qu’on en avait honte ». « Certains étaient horrifiés qu’on serve un repas créole traditionnel au Duc et à la Duchesse d’York lors de leur passage à Eurêka en 1987. Eux, étaient pourtant enchantés de goûter à nos touffés de brède et chatinis. Heureusement, les choses ont changé, notamment avec des gens comme Jacqueline Dalais qui ont remis notre cuisine en lumière. »
Jacques note aussi que les anciens ne perdaient rien de leurs produits. « Avec des restes de légumes, on faisait des achards, avec les restes de viande, de la blanquette. Aujourd’hui, il y a beaucoup de gaspillage, confie-t-il. Par ailleurs, le court-bouillon fait d’os et de carcasse a quasiment disparu, tout comme le jus de têtes de camarons écrasées avec lequel on préparait des saucesrouges exceptionnelles. »
Mais l’évolution est aussi positive, souligne le Chef Coopen. Travailler des produits nobles en les mariant à des saveurs locales, c’est toujours gagnant ! Des langoustes rôties avec une sauce rougail et sevret sek, accompagnées d’une fricassée chouchou et d’un touffé giraumon ou encore un cochon marron rôti servi avec une sauce salmi, un minn bwi rougaille ourite… La cuisine mauricienne se réinvente, tant au niveaugastronomique qu'à la maison.
Si notre goût a évolué, c’est aussi grâce à l’arrivée de nouveaux commerces qui ont donné accès à d’autres produits. Si auparavant, les Mauriciens ne connaissaient pratiquement que le capitaine, le sacré chien ou le poisson corne, ils peuvent aujourd’hui réaliser de superbes recettes avec de la dorade ou de la babonne.
Certains gestes aussi ont fait place à des pratiques plus modernes, la ross kari notamment, explique Jacques de Maroussem :
« On dira tout ce qu’on voudra, mais un chatini coco écrasé sur la roche apporte une texture différente, qu’on ne peut retrouver avec un mixer. »
N’évoquons même pas la compote de papaye qu’on faisait cuire pendant 3 jours et 3 nuits jusqu’à ce que lefruit devienne translucide. Pour Jacques de Maroussem, ces produits sont toujours autour de nous. Il suffit de se les réapproprier et de transmettre nos connaissances à la jeune génération…